La recherche SICAVOR

Système d'Information Contextuel sur les Caves et Cavités d'Orléans

La recherche SICAVOR

Système d'Information Contextuel sur les Caves et Cavités d'Orléans

Ce programme de recherche d’intérêt régional concerne l'étude des sous-sols de la ville d'Orléans. Il a pour objectif de révéler les trames urbaines anciennes et d’identifier les facteurs de risque dans les aménagements urbains. Il constitue une véritable opportunité de renouveler l’histoire des centres urbains, par le recensement et la documentation archéologique et architecturale.

Les termes de cave ou cavité définissent un ensemble d’aménagements souterrains d'origine humaine aux usages divers (que sa fonction d’origine soit conservée ou non). En 2010, environ 700 cavités étaient recensées sur le territoire communal d’Orléans. Les informations minimales les concernant ont été versées dans la base de données du BRGM et sont consultables par le public sur internet.

Le projet SICAVOR, a permis de porter à plus de 800 le nombre de cavités inventoriés intra-muros, mais aussi d’analyser et d’établir la chronologie ainsi que la typologie des différentes caves et carrières creusées depuis la période antique. La zone d’étude correspond à Orléans intra-muros, c’est-à-dire la partie ancienne de la ville protégée par la dernière enceinte, édifiée fin XVème – début XVIème siècle.

La recherche est articulée sur une coordination entre les laboratoires de recherche de la région Centre-Val-de-Loire intervenant sur l’histoire et l’architecture de la Ville (CESR), l’archéologie urbaine et l’archéologie du bâti (CITERES-LAT), les sciences de la Terre (Géo-hydrosystèmes continentaux, GEHCO), ou encore les sciences de la dynamique (PRISME). Participent aussi différents partenaires et acteurs du terrain Orléanais tels le BRGM, les archéologues du Pôle d'archéologie de la ville d’Orléans et les techniciens de la Direction de l'Environnement et de la Prévention des Risques (DEPR).

La valorisation de ce programme de recherche a été effectuée à plusieurs niveaux. Tout d’abord, un colloque scientifique a eu lieu en 2017, pour présenter à la fois une partie des résultats sur Orléans mais aussi les recherches sur ce domaine pour tout le territoire national. Par ailleurs, une mise en valeur des résultats est effectuée sous la forme de ce dossier thématique en ligne, incluant notamment un web-reportage vidéo, mais aussi sous la forme d’une programmation patrimoniale en 2018 (visites de cavités, conférences, édition d’une plaquette), organisée conjointement par le Pôle d’archéologie et le Label Ville d’Art et d’Histoire.

Inventaire et cartographie des cavités recensées dans le cadre du programme SICAVOR, fin 2017 (crédits : Pôle d'archéologie, 2017)
Inventaire et cartographie des cavités recensées dans le cadre du programme SICAVOR, fin 2017 (crédits : Pôle d'archéologie, 2017)

Pourquoi étudier les cavités ?

Les cavités constituent des supports archéologiques intéressants. En effet, s’inscrivant généralement dans la durée, elles sont le témoin des activités humaines sur le très long terme et révèlent souvent des changements de fonctions au cours de leur longue utilisation. Les techniques de constructions sont multiples et évoluent au fil du temps en relation avec les bâtiments urbains situés en surface. Elles constituent par ailleurs de bons indices chronologiques pour dater l’origine de ces constructions.

Les cavités d’époque médiévale (fin XIIe-XIVe siècle) sont nombreuses à Orléans et constituent un intérêt particulier pour le patrimoine de la ville. Situées parfois sur plusieurs niveaux de sous-sol successifs (jusqu’à quatre), certaines ont tout d’abord servi de carrières avant d’être transformées en caves. Ces derniers lieux de stockage sont connus depuis la période antique jusqu’à la période contemporaine. Leurs utilisations et transformations successives font partie intégrante de l’histoire de l’architecture, de l’économie et de la société orléanaise.

L’étude de cet objet archéologique très particulier apporte ainsi un regard nouveau et complémentaire sur l’évolution de la ville d’Orléans. Elle n’est cependant pas uniquement tournée vers le passé, puisqu’elle permet aussi d’alimenter les connaissances concernant la prévention des risques souterrains, enjeux majeurs pour l’urbanisation actuelle de la ville.

Relevé de carrière dans les dossiers de la Défense Passive (AMO, Défense Passive 2561)
Relevé de carrière dans les dossiers de la Défense Passive (AMO, Défense Passive 2561)
Sondages archéologiques dans une cave-carrière de la rue des Carmes à Orléans (crédits : Pôle d'archéologie, 2016)
Sondages archéologiques dans une cave-carrière de la rue des Carmes à Orléans (crédits : Pôle d'archéologie, 2016)
Utilisation du scnanner 3D dans une cave du quartier Saint-Aignan (crédits : Pôle d'archéologie, 2016)
Utilisation du scnanner 3D dans une cave du quartier Saint-Aignan (crédits : Pôle d'archéologie, 2016)
Relevé par scanner 3D Faro d'une cave-carrière à Orléans (crédits : SICAVOR, 2018)
Relevé par scanner 3D Faro d'une cave-carrière à Orléans (crédits : SICAVOR, 2018)

Histoire et nouvelles technologies

Plusieurs approches ont été conduites de front pour mener à bien le programme de recherche. En s’appuyant sur les études déjà existantes et les inventaires des cavités, les chercheurs ont pu réaliser une base documentaire contenant plus de 800 cavités enregistrées sur des périodes allant de l’Antiquité à la période contemporaine. Plusieurs méthodes de relevés, basées sur les technologies numériques ont été utilisées pour dresser les plans et restituer les volumes très précis de ces lieux difficilement accessibles.

Archives de papier ...

Certaines de ces cavités sont renseignées complètement ou partiellement par les archives. Un dépouillement des fonds orléanais conservés aux Archives municipales (AMO) et départementales (ADL) ainsi qu’aux Archives Nationales (AN) et à la Bibliothèque nationale (Bnf) a été effectué de manière la plus exhaustive possible. Ces archives permettent, pour certaines, de restituer la forme des cavités (Défense passive), mais aussi leurs liens avec le bâti de surface (plan d’alignements de voirie, procès-verbaux, …). Parfois ce sont les occupants et les constructeurs de ces cavités qui apparaissent, ces mentions permettant alors d’en déduire des fonctions.

Cependant, la destruction à Orléans d’une grande partie des archives, lors de l’incendie de la ville en 1940, a entraîné un vide documentaire important concernant les périodes pré-révolutionnaires. Aussi, peu de sources médiévales et modernes renseignent l’histoire de la ville. Le potentiel repose essentiellement sur les fonds révolutionnaires, des XIXe et XXe siècles, qui livrent le plus d’informations sur la topographie urbaine et le sous-sol orléanais.

... et vestiges archéologiques

Un recensement des cavités existait depuis les années 2000 et avait été effectué par le service de la Prévention des Risques Majeurs de la ville d’Orléans. Cet inventaire, disponible en ligne sur le site du BRGM, permettait d’avoir des informations préliminaires, mais aucun relevé, ni analyse de détail n’était disponible. Dans le cadre de SICAVOR, il a été complété tout d’abord à l’aide des recherches en archives, puis par les observations archéologiques directement sur site. Toutes les caves d’Orléans n’ont pas pu être visitées. Cependant, celles du quartier Saint-Aignan ont fait l’objet d’une campagne de prospection systématique soutenue par la DRAC Centre-Val-de-Loire (97 cavités identifiées).

Lors de ces visites, l’ensemble des cavités a fait l’objet de relevés et d’une étude archéologique plus ou moins poussée, en fonction du potentiel de chacune. Toutes ont bénéficié d’une description des espaces, des couvrements, des aménagements, etc…, et d’une proposition de datation.

Quelques cavités ont fait l’objet d’observations et d’un enregistrement plus minutieux, notamment des maçonneries conservées. Parfois, des sondages archéologiques ponctuels ont été réalisés pour préciser l’agencement stratigraphique des cavités.

Enfin, un inventaire de soupiraux visibles depuis la rue a permis de localiser des caves encore inconnues sur vingt-sept parcelles du quartier Saint-Aignan. Certaines parcelles étant restées inaccessibles au cours de l’étude, l’inventaire réalisé à ce jour reste à compléter dans les prochaines années.

Des cavités sous l'angle des nouvelles technologies

En raison de la faible accessibilité des cavités, parfois étagées sur plusieurs dizaines de mètres, et de leur grande surface, les relevés par des méthodes classiques de topographie et d’arpentage se sont révélés longs et fastidieux. Il a été nécessaire d’adapter les méthodes d’enregistrement afin de réaliser le maximum de plans de cavités en un minimum de temps.

L’outil le plus rapide et facile à utiliser dans ces conditions est le scanner 3D. Il permet à la fois de faire le plan des cavités mais aussi de restituer leur volume. Allié à un travail de géo référencement, il est alors possible de géo localiser précisément les cavités, pour déterminer notamment leurs relations avec le bâti au-dessus, mais aussi d’éventuels réseaux souterrains, modifiés au cours du temps. Cet outil autorise aussi un enregistrement précis des cavités à un moment donné, offrant ainsi un modèle numérique de référence daté qui permettra de vérifier sur le long terme la stabilité de ces ensembles et de mieux analyser le risque urbain.

Des cavités, oui, mais de quand ?

Les cavités sont des éléments archéologiques assez difficiles à dater. En effet, leur creusement laisse peu de traces si ce n’est l’excavation elle-même. Parfois, quelques indices permettent de dater de manière relative comme dans le cas de recoupements stratigraphiques, lorsque par exemple, la cavité recoupe des fosses ou des puits creusés antérieurement. Le mobilier retrouvé dans les fosses ou puits permet généralement de dater leur condamnation et donc de proposer cette date comme étant celle à partir de laquelle ce recoupement a pu avoir lieu : une fosse livrant du mobilier céramique du début du XIVe siècle et recoupée par une carrière cale chronologiquement le creusement de la cavité au plus tôt du début du XIVe siècle.

Mobilier archéologique

Par ailleurs, les sondages réalisés dans les cavités, permettent parfois de récolter quelques indices archéologiques sous la forme de tessons de céramique, autant d’éléments pour préciser la datation des différents aménagements et remaniements successifs.

Radiocarbone

D’autres méthodes de datation, dites absolues fournissent des éléments chronologiques précis, à la place du mobilier archéologique ou en complément. C’est le cas des datations par radiocarbone ou carbone 14 qui peuvent être menées dans le cas des cavités sur les charbons, bois, brindilles ou graines contenus dans les mortiers ayant servi à la consolidation des carrières ou à la construction des caves.

Dendrochronologie

Quand une relation de contemporanéité a été observée entre une cavité et les étages situées immédiatement au-dessus, munis de plafonds ou de charpentes en bois, il est possible d’utiliser la dendrochronologie pour dater la construction de l’ensemble.

Toutes ces méthodes de datation, sont complémentaires, chacune possédant ses limites et ses imprécisions. L’observation conjointe des formes des cavités et de leur relation avec le bâti associé aux datations archéologiques permet de dresser une typologie des cavités en fonction des périodes historiques.

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