Etude du bâti, 28 rue Etienne Dolet
Les emplacements des parois en pan de bois étudiées sont signalés en vert.
À l’angle nord-est du carrefour formé par la rencontre de la rue Etienne-Dolet avec la rue des Pastoureaux, cette propriété correspond au regroupement de deux anciennes parcelles voisines. La maison d’angle (a), objet principal de cette étude, comprend également au nord une courette (f) où se trouvent différents corps de bâtiment : tourelle d’escalier au sud (b), corps de bâtiment secondaire à l’est (c), étroit bâtiment annexe au nord actuellement détruit vers 1980 (d). Enfin, l’extrémité orientale de la parcelle comporte une ancienne maison (e), originellement distincte de la précédente, qui présente une façade en pan de bois à grille, construite au XVIIIe siècle. À l’intérieur, des percements ont été établis aux différents niveaux du mur pignon mitoyen afin de relier cette habitation orientale (e) à la maison d’angle (a).
Une maison reconstruite à la fin du XVe siècle
La maison, située à l’angle des rues Etienne-Dolet et des Pastoureaux, est reconstruite entre 1495 et 1500 (datation dendrochronologique ; phase 2). Seul le mur pignon oriental de ce nouveau bâtiment est en maçonnerie, puisque les trois autres parois sont en pan de bois. Les deux façades sur rue présentent une ossature à croix de Saint-André, tandis qu’une armature plus simple, à grille, a été préférée pour le mur nord donnant sur la cour et sur la tourelle d’escalier. Le hourdis est fait de briques. Le rez-de-chaussée était dévolu au commerce et probablement doté de devantures de boutique sur ces deux façades. Les étages, servant de logements, sont éclairés par des croisées (fenêtres à meneau à traverse) parfois jouxtées d’une demi-croisée (fenêtre à traverse) ou accompagnées de petits jours rectangulaires. Le comble, couvert par une charpente à pannes, était éclairé par de lucarnes situées au droit des baies principales des étages. L’étude a confirmé que les deux façades (sud et ouest) se trouvaient initialement en avancée sur les rues. Il n’a pas été possible de vérifier s’il s’agissait de façades à l’aplomb (hypothèses 2 ou 3) ou si les étages étaient en encorbellement par rapport au rez-de-chaussée (hypothèse 1).
Le recul des façades
Ces façades sont reculées durant la 2e moitié du XVIe siècle ou au XVIIe siècle (phase 3) afin d’élargir le carrefour. Ces ajustements expliquent certaines irrégularités visibles aujourd’hui sur les parois : suppression des panneaux de croix de Saint-André à l’est de la façade rue Etienne-Dolet ; pièces de bois raccourcies aux extrémités de cette même façade ; décalage vers le nord de deux compartiments de panneaux de croix de Saint-André sur la façade rue des Pastoureaux, au détriment des anciennes croisées des étages qui sont alors transformées en demi-croisées.
Les réfections du XVIIIe siècle
Les remaniements du XVIIIe siècle sont communs à d’autres maisons orléanaises de cette époque (phases 5 et 6) : réfection du hourdis qui est peint en blanc tandis que les pièces de bois sont recouvertes d’un pigment ocre-jaune ; modifications des baies pour l’accueil de nouvelles menuiseries (suppression des meneaux et des traverses, comblements des jours) ; pose de tirants métalliques pour renforcer la structure des pans de bois. C’est à cette époque qu’est construite la maison voisine à l’est, présentant une façade en pan de bois à grille sur la rue Etienne-Dolet. Les façades seront recouvertes par un enduit au plâtre au XIXe siècle (phase 7).
L’observation des caves a montré que la salle centrale du 2e niveau de sous-sol appartenait à une maison médiévale, aujourd’hui disparue, qui se développait sous l’emprise de la cour, de la cage d’escalier et du bâtiment nord-est. Cette habitation médiévale est probablement détruite ou profondément remaniée lors de la l’édification de la maison en pan de bois vers 1500.
L’accolade était sculptée sur une entretoise et reliait les pinacles ornant les poteaux. Ces décors d’inspiration « gothique » étaient fréquents sur les encadrements des fenêtres des maisons en pan de bois orléanaises édifiées entre la fin du XVe siècle et la première moitié du XVIe siècle. Il est par contre plus rare que ces décors s’étendent sur les pièces de bois situées entre les fenêtres, comme ici. Ce décor fut bûché à la fin du XVIIIe siècle ou au XIXe siècle.
L’arbalétrier à l’angle de la charpente de comble fut scié en pied lors du déplacement des façades en pan de bois. Il était initialement raidi par une jambe-de-force dont subsiste la mortaise d’assemblage sur sa face inférieure.
Cette façade en pan de bois à grille repose sur un mur bahut en maçonnerie derrière lequel se trouve un cellier semi-excavé, couvert d’un plafond. L’ossature du pan de bois se compose d’un poteau de fond où s’assemblent les sablières ainsi les poutres des plafonds des niveaux intérieurs. Le rez-de-chaussée, légèrement surélevé, et l’étage étaient éclairés par deux fenêtres, tandis qu’au nord une porte donnait accès au petit corps de bâtiment détruit vers 1980. C’est probablement à la fin du XVIIIe siècle ou au début du XIXe siècle que fut peinte sur la façade une enseigne commerciale : "Atelier de peinture". Ce bâtiment a été rehaussé au XIXe siècle.
Il s’agit de l’un des rares endroits de la façade où le hourdis de la construction du bâtiment était conservé. Les briques sont liées par des joints de mortier de chaux. Ces derniers devaient être initialement saillants.
En façade sur cour, les pièces de bois de la tourelle d’escalier ont reçu plusieurs traitements colorés successifs à partir du XVIIIe siècle. On distingue ici les vestiges d’une couche de pigment ocre-jaune recouverte par une autre de couleur rouge-orangé.
L’enduit était délimité aux angles par des aplats de peinture blanche imitant des chaînages de pierre de taille. Cet enduit sera retiré lors de la restauration de la fin des années 1970, mettant au jour l’ossature en pan de bois.