ZAC du Val Ouest
ZAC du Val Ouest
Les deux diagnostics de la ZAC du Val Ouest, tranches 1 et 2, réalisés de part et d’autre de la rue du Boyau à la fin de l’année 2017/premier trimestre 2018, ont permis la découverte d’une occupation continue de la rive sud du Val d’Orléans depuis la Préhistoire jusqu’à nos jours, avec pour temps fort le Mésolithique, la Protohistoire ancienne et l’Antiquité. Les 14 hectares explorés à près de 10% par l’ouverture de tranchées parallèles font qu’en termes de superficie, il s’agit là de la plus grosse opération archéologique réalisée pour l’heure dans le secteur du Val d’Orléans.
L'évolution du relief de -8000 à nos jours
Les résultats documentent tout d’abord certains aspects liés au paysage et à son évolution.
Si aujourd’hui les terrains correspondent pour l’essentiel à des friches agricoles et apparaissent à certains égards relativement plats, cet aspect est la conséquence de leur remaniement et mise en culture à partir de l’époque moderne. Antérieurement à cela, ce secteur situé au cœur de la plaine alluviale du Val d’Orléans, entre Loire et Loiret (soit en zone inondable), apparait plus vallonné, soumis plus fortement qu’aujourd’hui aux aléas du fleuve. Il se caractérise d’une part par la présence d’une terrasse alluviale septentrionale dominée par quelques buttes naturelles (dont l’une est située au sein de l’emprise de la tranche 2), et d’autre part par la présence d’un chenal courant au pied de la terrasse, dont le cours et l’importance varie dans le temps, et à partir duquel quelques autres cours d’eau mineurs ont pu temporairement se former.
Les buttes et le chenal constituent les points forts du relief qui conditionnent les occupations humaines. Les données à disposition suggèrent un comblement lent du chenal initié dès le Mésolithique, et achevé au minimum au Néolithique final sur l’emprise diagnostiquée. Par la suite, le site n’en demeure pas moins localisé sur un couloir d’inondation comme le souligne la nature hydromorphe du comblement des structures postérieures localisées sur l’ancien chenal.
Des noyaux d'occupation saisonniers de la fin de la Préhistoire
Les traces d’occupation les plus anciennes mise au jour sur le site renvoie au Mésolithique (-9000/-6000).
Il s’agit de la découverte d’un échantillon de plus de 1000 pièces de silex taillés et pierres chauffées ainsi que de la présence de quelques structures excavées de type fosse et foyer qui rendent compte, au-delà d’une simple fréquentation des berges du chenal, d’une réelle implantation humaine dont la pérennité ne peut être définie à ce stade des recherches.
La répartition du mobilier au sein de quatre couches sédimentaires distinctes, et sur une superficie d’environ 3 hectares, témoignent, d’une part, de l’excellente conservation des niveaux préhistoriques, et d’autre part de l’existence de différents noyaux d’habitat se succédant entre 7500 et 6400 av. J.-C. Leurs caractéristiques et nombres restent à définir plus précisemment.
Ces découvertes rejoignent celles réalisées par l’Inrap sur de plus petites fenêtre d’ouverture rue de la Cigogne et rue de la Mouillère où les noyaux d’occupation mésolithique révélés apparaissent antérieurs à ceux du Val Ouest (7960-7650 av. J.-C.). Ce mode d’occupation matérialisé par une succession de noyaux d’habitat au sein d’un terroir limité renvoie à des populations encore nomades qui, favorisées par le réchauffement climatique post-glaciaire duquel découle l’abondance des ressources naturelles, limitent leurs déplacements au sein d’un territoire plus restreint qu’au Paléolithique, selon des rythmes saisonniers. Cela peut entrainer la réutilisation d’un campement à une saison donnée, sur de nombreuses années.
Des traces d'habitats mal caractérisées mais avérées du Néolithique à l'Age du Fer
Du Néolithique à l’âge du Bronze, les indices d’occupation avérés sont plus ténus mais bien réels. Ainsi, compte-t-on la présence d’un four pour le Néolithique moyen ; d’un trou de poteau daté par radiocarbone du Néolithique final (semblant toutefois participer d’un grand ensemble de trous de poteau non datés dont aucune organisation ne se distingue en l’état des recherches) ; et d’un second four daté quant à lui du Bronze ancien.
A partir du Bronze final les occupations détectées lors du diagnostic s’avèrent mieux représentées. Ainsi une occupation du Bronze final IIIb/Hallstatt C est-elle documentée par la découverte de quatre structures incluant une fosse indéterminée, un probable puits et deux dolines. Le caractère détritique du comblement de chacun de ces faits informe d’une occupation à caractère domestique (vases de stockage, éléments de tissage et de mouture). Distantes de 35 à 55 m, ces structures s’alignent sur une bande de 100 m de long orientée grossièrement nord/sud. Ces quelques éléments permettent d’évoquer l’existence d’une probable unité d’habitat à fonction agro-pastorale se déplaçant dans l’espace.
Pour le Hallstatt final/Tène ancienne, les vestiges sont présents au sein des deux tranches de l’opération, avec la présence le long de la rue des Chabassières d’une zone de stockage composée de 4 silos dont le caractère détritique des comblements informent sur la proximité immédiate d’un habitat (à situer en dehors de l’emprise du diagnostic). En tranche 2, ce sont quatre faits (un silo et trois fosses dont une ayant servie de dépotoir) qui viennent signifier l’occupation du site à cette période. Comparé à la période précédente, leur dispersion est plus lâche, les faits les plus extrêmes étant distants de 200 m, et le mobilier y est plus rare. Notons toutefois la présence d’une structure de stockage, d’un élément de mouture et de vidanges de foyer qui suggèrent là encore l’existence d’un habitat agro-pastoral à caractère domestique. La synthèse des vestiges en tranches 1 et 2 suggère donc l’existence de deux zones d’habitat distinct.
Une exploitation agro-pastorale d'époque antique
Les structures rattachées à la période gallo-romaine couvrent, selon une densité très inégale, près de 11 hectares à cheval entre les tranches 1 et 2 de l’opération. Elle est caractérisée par l’aménagement à l’ouest, dans le dernier quart du Ier s. av. n.è., d’un enclos fossoyé rectangulaire de 8000 m² dont le développement jusqu’au milieu du Ier s. s’accompagne d’une dilatation de l’espace vers l’est et le sud, incluant la mise en place d’un réseau parcellaire. La répartition du mobilier au sein des structures d’une part, et la présence de quelques fosses-dépotoir et trous de poteau attenants à l’enclos attestent du caractère domestique de cet habitat correspondant à un établissement rural somme toute modeste.
A l’extrémité nord-est de la tranche 1, on observe la mise en place d’aménagements venant structurer cet espace à vocation agro-pastoral dans le courant du Ier siècle ap. J.-C. et perdurant probablement au long des II-IIIè s.: la construction d’une voie secondaire rejoignant plus au nord la voie antique Orléans/Tours scinde la zone en deux parties et permet de distinguer l’espace se déployant sur son flanc oriental caractérisé par la présence de fossés de grande envergure dont les recoupements (témoins d’évolutions), et la présence de rejets domestiques, permettent d’évoquer les marges d’un habitat qui se déploierait essentiellement hors emprise.
La mise en relation de l’évolution chronologique et spatiale des faits antiques découverts en tranches 1 et 2, ainsi que la mise en perspective des avantages topographiques et économiques du site (proximité des axes commerciaux fluviaux ou terrestres, proximité du centre de consommation que représente Cenabum) permettent d’envisager la constitution dans le courant du Ier s. d’un domaine d’exploitation à la romaine potentiellement de type villa.
Des traces fugaces d'occupation médiévale
Pour la période médiévale, les indices d'une fréquentation du site se résument à la présence d’une structure et de 12 éléments matériels attribuables au Haut Moyen Age, auxquels se joignent 18 fragments de céramiques du XI-XVe s., ainsi qu’une fosse et trois fossés de la fin du XVe/début XVIe siècle. Aussi dérisoires qu’ils peuvent paraître, ces maigres indices témoignent vraisemblablement de la continuité de l’occupation d’un terroir à des fins agricoles depuis l’Antiquité jusqu’à la période médiévale, selon des modes et des évolutions qu’il ne nous est pas permis d’évaluer. Ils permettent d’exclure l’idée d’un hiatus dans l’occupation pourtant souvent avancée sur ce côté du Val d’Orléans, en lien avec l’aspect submersible des terres de la plaine alluviale.
Les périodes moderne et contemporaine sont bien représentées témoignant de la vocation agricole du quartier Saint Marceau depuis l’époque moderne, une vocation qui concrètement dans le cas de l’emprise de la ZAC du Val Ouest a perduré jusqu’à nos jours. Cette activité agricole se matérialise par la présence de chablis (viticulture), de puits et de structures de drainage et de fosses-dépotoirs.