Vivre aux abords du fleuve de l'âge du Bronze à l'âge du Fer

Sur le territoire national, à l’âge du Bronze (2 200 – 800 av. J.-C.) et au premier âge du Fer (800 – 500 av. J.-C.) de profondes évolutions ont lieu, comme l’intensification des échanges, l’accroissement de la hiérarchisation sociale et l’émergence de pouvoirs centralisés. Si l’on possède peu de témoignages matériels à Orléans pour ces périodes, les découvertes d’armes et de parures en bronze réalisées dans la Loire ou dans les tertres funéraires des communes voisines, comme Saint-Cyr-en-Val, permettent de supposer l’existence d’une aristocratie guerrière établie de part et d’autre du fleuve.

Aussi, les fouilles archéologiques très récentes sur la rive gauche de la Loire, dans le quartier de La Source, renseignent-elles sur les communautés agricoles installées dans le Val entre la fin de l’âge du Bronze et le début de l’âge du Fer.

Près du Parc Floral, rue Charles Sadron, une communauté de la fin de l’âge du Bronze (1 000 av. J.-C.) délimite le bord du plateau à l’aide d’un grand fossé d’enceinte, dont la forme du tracé et la surface protégée restent à ce jour indéterminées. Par la suite, une petite communauté d’agriculteurs s’installe de part et d’autre du fossé déjà comblé. Il s’agit probablement de petites installations agro-pastorales. Elles sont datées de la période du Hallstatt C (800 - 650 av. J.-C.).

Sur la ZAC du Val Ouest, diagnostiquée en 2017-2018, des occupations domestiques sont également attestées. L’économie semble orientée vers l’agriculture du fait de la présence d’une zone de stockage composée de silos à grains. L’ensemble de ces vestiges est daté du Hallstatt final / Tène ancienne soit de 500 à 300 av. J.-C. environ.

 

Life on the river banks, from the Bronze Age to the Iron Age

In France, huge changes occurred during the Bronze Age (2 200 – 800 BC) and the early Iron Age (800 – 500 BC) : the strengthening of trade links, the increase of social hierarchy and the emergence of centralized power. Although few material testimonies in Orléans were found for these periods, weapons and bronze ornaments were discovered in the Loire river and in funerary mounds in neighbouring towns like Saint-Cyr-en-Val. Such discoveries tend to prove the existence of a warlord aristocracy on either side of the Loire.

In addition to this, interesting information about the farming communities established in the Val between the end of the Bronze Age and the beginning of the Iron Age was gathered through recent archaeological excavations carried out on the left bank of the Loire, in the Source district.

Near the Parc Floral, located in Charles Sadron Street, a community of the end of the Bronze Age (1 000 BC) marks out the edge of the plateau with its large enclosure ditch, whose shape and surface are still unknown to this day. Later on, a small farming community settled on either side of the already filled ditch. They were probably small mixed-farming structures, dating from Hallstatt C (800 – 650 BC).

Human dwellings were also attested in the commercial area of the West Val after a diagnosis carried out in 2017-2018. The presence of a storage zone consisting of grain silos gives evidence of an economy focused on farming. These remnants date from the late Hallstatt period / late Tène, i.e. from 500 to approximately 300 BC.

Les épées en bronze

Au Bronze final émerge le statut de guerrier, qui entraîne une plus forte hiérarchisation de la société. On observe ainsi l’apparition d’armes en bronze et en particulier de l’épée, symbole de pouvoir et de prestige, qui confère à son possesseur un statut particulier. A cette période, on remarque également l'augmentation de dépôts (ou caches) d'objets métalliques, que ce soit en terre ou en milieu humide. Jusqu’au IXe siècle av. J.-C., ce sont les dépôts en milieu humide qui sont les plus prisés pour l’armement.

Les nombreux dragages réalisés sur la Loire, dans les alentours d’Orléans, ont permis de mettre au jour un abondant mobilier datant de l’Âge du Bronze. Il comprend des épées aux typologies très diversifiées. Egalement retrouvées à travers tout le territoire, elles démontrent l’existence d’échanges commerciaux entre les différentes régions.

Ces trois épées en bronze ont été trouvées au sud-ouest d’Orléans, entre Mareau-aux-Prés et Saint-Ay, deux communes se faisant face de part et d’autre du fleuve. Elles appartiennent au complexe dit atlantique, caractéristique de la moitié ouest de la France (de la côte Atlantique jusqu’à la Sologne) dont près de 4000 épées, découvertes enterrées ou immergées dans des rivières, ont pu être recensées pour le Bronze final. Au sein de ce type, on dénombre des catégories différentes selon la forme de la lame.

Les deux épées complètes provenant de Mareau-aux-Prés et de Saint-Ay sont dites pistilliformes à languette tripartite. La languette est la partie métallique sous la poignée de l’épée. Lorsqu’elle est tripartite, elle épouse la forme des trois parties de la poignée qui la recouvrait, à savoir la garde, la fusée et le pommeau. Les languettes tripartites se développent à partir du milieu du Bronze final (1 150 – 930 av. J.-C.) et sont adoptées dans toute l’Europe. Il existe toutefois une grande variété de types et de décors. Une lame est dite pistilliforme lorsque sa largeur maximale est atteinte au niveau du deuxième tiers de sa longueur. Les épées pistilliformes sont largement répandues dans le groupe atlantique au milieu du Bronze final. Les trous de rivets, généralement trois au niveau de la fusée et quatre au niveau de la garde, peuvent parfois être remplacés par de longues fentes en partie médiane.

Concernant le fragment d’épée en bronze découvert à Saint-Ay, il s’agit également d’une épée atlantique à languette tripartite, mais à lame effilée, car ses tranchants sont rectilignes et convergents. Elle possède aussi des trous de rivets sur sa languette.

Fragment d'épée à lame éffilée (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)
Fragment d'épée à lame éffilée (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)
Epée

Bronze final I-IIa (1 350 – 1 150 av. J.-C.)

Saint-Ay

Alliage cuivreux

L. 46 cm, l. 4,6 cm

Orléans, Musée d'Histoire et d'Archéologie (inv. 999.12.6.1 et .2)

Epée pistilliforme (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)
Epée pistilliforme (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)

Epée

Bronze final IIb-IIIa (1 150 – 930 av. J.-C.)

Mareau-aux-Prés

Alliage cuivreux

H. 57 cm, l. 4,5 cm, P. 0,6 cm

Orléans, Musée d'Histoire et d'Archéologie (999.12.7)

L'épée pistilliforme (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)
L'épée pistilliforme (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)

Epée

Bronze final IIb-IIIa (1 150 – 930 av. J.-C.)

Saint-Ay

Alliage cuivreux

H. 51 cm, l. 4,8 cm, P. 1,6 cm

Orléans, Musée d'Histoire et d'Archéologie (999.12.8)

L'anneau de jambe

Au premier âge du Fer, les parures annulaires massives se développent particulièrement, parallèlement à la disparition progressive des épées. On en retrouve en grand nombre dans des dépôts cultuels, mais également funéraires dans le Bassin parisien, sous forme de dépôts simples (seuls), ou de dépôts complexes (joints à de l’armement et de la vaisselle). La typologie des anneaux du dépôt de Saint-Brice (77), par exemple, se rapproche particulièrement de l’anneau de jambe de Saint-Cyr-en-Val. On peut donc émettre l’hypothèse de l’existence de contacts culturels entre le Bassin parisien et le centre-ouest de la Gaule.

Lorsqu’ils sont découverts en contexte funéraire, ces anneaux de jambe proviennent le plus souvent de sépultures à inhumation de l’aire atlantique et hallstattienne. Le tumulus constitue la sépulture caractéristique de la civilisation de Hallstatt, il s’agit d’une butte peu élevée d’une dizaine de mètres de diamètre. En Sologne, on en dénombre plusieurs centaines : à Saint-Cyr-en-Val, Mézières-lez-Cléry, La Ferté-Saint-Aubin, etc.

Les tumuli de la civilisation de Hallstatt renferment généralement un abondant et riche matériel associé au défunt, c’est pourquoi ils sont dits « princiers ». Ce phénomène se retrouve à travers l’Europe, ce qui permet de prendre conscience de l’ampleur de la civilisation hallstattienne. Dans la majorité des cas observés, les tumuli princiers sont implantés à proximité de sites fortifiés du premier âge du Fer, au sein desquels devaient probablement prendre place des résidences princières ou des lieux de concentration de biens et de marchandises destinés au commerce méditerranéen – le débat reste ouvert entre les chercheurs. De ce fait, la présence de nombreux tumuli à riche et abondant matériel permet de supposer la présence d’un site fortifié du premier âge du Fer à l’emplacement d’Orléans, qui n’est toutefois pas encore attesté archéologiquement à cause du développement du tissu urbain de la ville actuelle.

Cet anneau de jambe est en fait le remontage des fragments de deux ou trois anneaux de jambe découverts dans un tertre, à Saint-Cyr-en-Val (La Planche) avant 1836. Ce type d’anneau est bien attesté dans le centre-est du Bassin parisien au premier âge du Fer (ou civilisation de Hallstatt).

Anneau de jambe (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)
Anneau de jambe (crédits : Ch. Camus, Musées d'Orléans, 2019)
Anneau

Premier âge du Fer (800 – 500 av. J.-C.)

Saint-Cyr-en-Val

Alliage cuivreux

l. 2,6 cm, diam. 18,5 cm

Orléans, Musée d'Histoire et d'Archéologie (A.6273)

Année de découverte : avant 1836

Date de modification : 8 juillet 2020

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